Que faisons-nous, chacun, de notre côté monstrueux ? Entre déni et projection — c’est l’autre qui est un monstre —, ne pas penser nos monstres intérieurs empêche d’en faire quoi que ce soit. L’enjeu est de taille : ce qui se cache prend l’espace du silence, et s’agrandit, au fil des générations. Pourtant, un monstre intérieur n’est que la forme que donne notre moralité à des pulsions nécessaires à notre survie : il s’agit alors de les entendre, et de leur donner la place à laquelle elles sont constructives. Avant qu’il ne soit trop tard… Pour nous-mêmes, pour nos enfants, pour le public avec lequel nous travaillons. Car comment un professionnel peut-il travailler avec des personnes concernées par la violence, sans en être lui-même touché ? Comment celle-ci résonne-t-elle en lui, que peut-il en faire, pour ne pas y laisser ses nerfs, à défaut de sa raison ? Ce texte, entrecoupé de présentations d’outils, est un témoignage d’une professionnelle qui se veut partage de réflexions et d’expériences. Au-delà d’une question morale, il s’agit de dénouer ce que la violence a pu déposer en soi, pour avancer, plus libre, vers un avenir désengagé des schémas de reproduction. Trouver du sens, se redonner du pouvoir d’agir, libérer sa capacité créative : l’enjeu est individuel, tout autant que sociétal.